QUELLES DIFFERENCES ENTRE LES ECOLOGISTES (MEI) ET LES VERTS ?
Rappel historique
L’écologie politique est née des Trente glorieuses, à un moment où le bulldozer et le tracteur déménageaient l’Europe. La Gauche et la Droite étaient aux commandes. Faute de trouver une offre politique leur convenant, les premiers partis, Ecologie et Survie (février 1973) devenu le Mouvement Écologique après la campagne de René Dumont (1974), le Green Party (mars 1973) et le Parti écologiste genevois (mai 1973) ne se positionnaient pas dans l’espace bipolaire et affirmaient leur identité propre.
Une certaine Gauche se rallia à la lutte antinucléaire dès 1973, non pour les risques environnementaux que pouvait représenter cette filière mais pour les conséquences institutionnelles d’une énergie aussi centralisée et aussi sensible (la Bombe). Cette Gauche ne s’intéressa au développement politique de l’écologie qu’après le bon résultat de la liste Europe Écologie de 1979.
Une différence d’identité, de culture et de tempérament
Au-delà des mots, la différence entre le Mouvement Écologiste Indépendant- Les Ecologistes, d’une part, continuateur du Mouvement Ecologique des années 1970 et qu’incarnent encore en 2021 certains responsables du MEI, et, d’autre part, les Verts, est d’abord une différence d’identité, conforté par le positionnement et le tempérament des différents acteurs.
Les Verts sont de gauche, une identité revendiquée, non seulement pour des raisons tactiques mais aussi parce qu’elle répond à un héritage mental et culturel, qui considère la société formée de classes aux intérêts divergents, une possédante et une défavorisée. Cette dernière est aujourd’hui souvent incarnée par les immigrés. Certaines personnes ont besoin du conflit de classe pour exister et justifier leur engagement, d’autant qu’elles appartiennent plutôt aux catégories favorisées. Les Verts ont choisi d’utiliser la dynamique mobilisatrice du conflit, comme le font les partis de Gauche depuis deux siècles. [1]
Cette posture à plusieurs conséquences :
1.elle confine les partenariats possibles aux seuls partis se revendiquant de la Gauche, les Socialistes et les Communistes notamment, alors que le MEI est capable de négocier des partenariats sur un projet et non sur une étiquette ; la contradiction de ce choix tient à ce que le projet du PC et du PS sont fréquemment divergent avec celui des Verts ;
2.elle impose, pour mobiliser une clientèle électorale déterminée (les électeurs formatés gauche) d’avoir recours à une certaine sémantique, à des thèmes qui font clivage dans l’opinion, et à démontrer une certaine agressivité à l’égard de la Droite ; de fait, les thèmes spécifiquement écologistes deviennent seconds et certains apparaissent dérisoires comme la nature et la beauté ; l’hypothèse selon laquelle les Verts sont insensibles à ces thèmes est aussi vraisemblable ; à l’opposé, la beauté du Monde et le respect de la nature sont au centre des motivations du MEI ;
3.les Verts tendent de mobiliser à leur bénéfice l’électorat de Gauche, là où les Ecologistes (MEI) font de la pédagogie à l’adresse de tous et de toutes sans distinction d’appartenance partisane.
L’éolien est, pour les Verts, le drapeau de l’antinucléaire primitif, marqueur d’une certaine Gauche verte. L’impact sur les paysages et sur la faune est minimisé. Le soutien de fait au capitalisme mondial est passé sous silence (ce n’est pas la moindre des contradictions). Les populations rurales qui s’opposent au rêve des écolos urbains sont traitées d’égoïstes. Le MEI ne développe pas d’idéologie sur la technique, mais tente un pragmatisme intelligent face au réel en refusant l’industrialisation des campagnes et l’agression technologique des habitants.
Les Verts rejettent toute réflexion sur la démographie, ne considérant qu’une seule causalité de la crise écologique : la consommation des pays riches. Peu importe le nombre de consommateurs : l’opposition entre riches et pauvres est ici conforme à leur vision conflictuelle du monde. Les débats menés publiquement avec eux montrent qu’ils sont prêts à saturer la planète d’hommes sans considération pour la place des autres êtres vivants et sans considération des conditions de vie des humains dans les mégalopoles où tout le monde a vocation à s’entasser.
Je distingue les écologistes minéraux des écologistes sensibles. Cette distinction se vérifie aux élections : les premiers (EELV) sont urbains, les seconds (MEI) sont péri-urbains et ruraux. Les premiers développent des thèmes liés à la ville minérale (transports urbains, énergie vue depuis la ville) et à ses dysfonctionnements sociaux : l’approche est intellectuelle, volontiers idéologique. Les seconds privilégient des thèmes liés à l’espace extra-urbain (forêt, paysages, agriculture, énergie vue depuis la campagne…).
Précision complémentaire. Quand nous affirmons n’être ni de Droite, ni de Gauche, cela ne signifie pas que nous sommes des environnementalistes apolitiques. Cela signifie que nous revendiquons une identité écologiste qui nous distingue des formations politiques productivistes (Droite et Gauche). Nous sommes des conservateurs dans la mesure où nous voulons conserver le patrimoine naturel, culturel, esthétique… que la Terre nous apporte, nous sommes des radicaux dans la mesure où nous voulons répondre aux défis en s’attaquant à la racine des problèmes.
Notre positionnement nous autorise à dialoguer avec toutes les formations et à nouer des partenariats aussi bien à Gauche (même avec les Verts) qu’à Droite sur la base d’un projet et d’objectifs concrets. L’objectif est d’influer le destin collectif. Aujourd’hui, cette pétition de principe reste théorique sur le versant gauche, sauf aux élections locales.
Antoine Waechter
4 octobre 2021
[1] A l’image des Socialistes, l’appartenance sociale des Verts est en contradiction avec le positionnement de classe. Les électeurs du MEI appartiennent davantage à la classe moyenne
Comments